La dégénérescence progressive des neurones en région thoracolombaire est responsable d’une ataxie et d’une parésie, associées à divers symptômes nerveux comme une diminution des réflexes et du tonus musculaire, le tout évoluant lentement vers une paralysie flasque du train postérieur. (Sources Laboklin) [1].
La Myélopathie Dégénérative (Degenerative Myeolopathy) atteint les chiens âgés, parfois dès de 8 ou 10 ans, mais plutôt entre 10 et 12 ans.
Une communication scientifique (University of Missouri, Massachusetts Institute of Technology, Swedish University of Uppsala, University of Pennsylvania) faite en 2008 [2] lève le voile sur cette maladie atteignant les chiens âgés. Après étude sur des chiens des 5 races prédisposées pour cette maladie (Pembroke Welsh Corgi, Rhodesian Ridgeback, Berger allemand, Boxer et le Chesepeake Bay Retrieve), une mutation sur le gène SOD1 et un risque élevé de développer la maladie a été mise en évidence.
La mutation a, depuis, été identifiées dans de nombreuses races :
American Eskimo Dog, Bouvier bernois, Cardigan Welsh Corgi, Golden Retriever, Montagne des Pyrénées, Kerry Blue Terrier, Caniche, Carlin, Shetland Sheepdog (Sheltie), Soft Coaten Wheaten Terrier, Foxterrier à poil dur, Saarloos, le chien Loup tchécoslovaque ou le Barzoï pour n'en citer que quelques unes. Elle est également présente dans diverses races de chiens de Bouvier ou Bergères, dont le Colley.

La mutation intervenue sur le gène SOD1 consiste en une substitution d'un acide aminé : La lysine, en un autre : Le glutamate.
Ce gène code pour une enzyme dont le rôle est de protéger les cellules contre les déchets toxiques résultant des processus cellulaires.
La séquence codante étant modifiée par cette substitution d'acide aminé donne de nouvelles propriétés à cette enzyme.
Des expériences menées en laboratoire sur des souris montrent que la mutation n'entraine pas la perte d'activité de l'enzyme. [3]
Par contre, une accumulation anormales des protéines formant alors des agrégats est constatée.
L’agrégation des protéines est un mécanisme connu dans les maladies neurodégénératives.
Ces agrégats pourraient provoquer la destruction cellulaire des zones concernées.
Une hypothèse avancée parmi d'autres. L’étiologie de la DM, comme de la SLA chez l'être humain, demeure inconnue et aucun traitement curatif n’a été mis au point à ce jour.
La mutation a une pénétrance incomplète :
Les chiens malades sont tous homozygotes pour la mutation. Mais tous les homozygotes mutés ne développeront pas obligatoirement la maladie.








DM, identification et évolution de la maladie :



Depuis quelques mois vous avez remarqué que votre chien est moins dynamique. Il marche moins vite, il a du mal à monter les escaliers ou à sauter dans le coffre de la voiture. Une évolution normale chez un chien ayant 10 ou 11 ans.
Pourtant, il a parfois une démarche anormale, titubante comme celle d'une personne en état d'ébriété.

  • La première alerte va venir de la perte de proprioception. La proprioception est la capacité qui est donnée aux êtres vivants d'avoir une connaissance, consciente ou non, de la position relative des parties du corps. Le chien va laisser trainer ses pattes arrière lors de la marche. Les griffes vont alors racler le sol et faire du bruit si ce sol est dur, macadam par exemple.
  • Ces anomalies du déplacement ne sont jamais constatées lors d'atteintes mécaniques du système locomoteur, dysplasie par exemple.

    Test à faire:
    Pour détecter une perte de proprioception des membres postérieurs: Plier le pied du chien et lui faire prendre appui sur le sol.
    S'il attend plusieurs secondes ou reste en position repliée, il y a perte de proprioception et une DM doit être suspectée.

  • Les atteintes osseuses ou articulaires, nombreuses chez les chiens à partir d'un certain âge (Syndrome de la queue de cheval, Sténose lombosacrée, Spondylose, hernies ou dysplasie), sont toutes accompagnées de douleurs.
    Dans le cas de la DM, il y a absence de douleur de dos.

    La proprioception (perception spatiale du positionnement des membres):
    La proprioception désigne l'ensemble des récepteurs, voies et centres nerveux impliqués dans la perception, consciente ou non, de la position relative des parties du corps.
    La perte de proprioception est un des symptômes de la DM. Elle est causée par le début de l'atteinte neurologique de la moelle épinière. Les pattes arrière peuvent se croiser et le chien traine de plus en plus souvent l'une ou l'autre patte sur le sol avec l'extrémité des pattes, les phalanges, qui restent crispées, provoquant des blessures sur la face dorsale des doigts de la patte par frottement sur le sol.

  • Ces 3 signaux (âge, proprioception et absence de douleur) sont, hélas, ceux de la DM.
  • Le dépistage ADN de la mutation confirmera la DM si le chien est déclaré homozygote pour la mutation.

  • Les signes de paralysie apparaissent ensuite. Les membres perdent progressivement leur vitalité.
    Les motoneurones dégénèrent. Ils n'envoient plus d'influx électrique aux fibres musculaires qui en ont besoin pour stimuler l'activité musculaire.
    Les muscles commencent à s'atrophier.




  • 6 à 12 mois peuvent se passer avant la paralysie complète de l'arrière-train.
    Il n'y a actuellement aucun traitement connu pour arrêter, ou même seulement freiner l'évolution de la maladie.
    Une administration quotidienne de vitamine E semble ralentir l'évolution, rapporte Laurent Cauzinille (docteur vétérinaire diplômé de l'American College of Veterinary Medicine Neurology) [4].



Une évolution en paliers de la maladie est parfois constatée : une détérioration de l'état du chien intervenant après un stress ou un événement quelconque nous échappant.
Si la maladie ne provoque pas de souffrance physique, nous ne savons pas si le chien souffre psychologiquement du fait de se sentir handicapé.
Il appartient alors à chaque maître d'envisager la suite : faire endormir son animal lorsqu'il arrive en phase terminale, ou l'appareiller pour qu'ils poursuivent malgré tout un bout de chemin ensemble. La décision est difficile, mais aucun choix n'est critiquable.
Le cours de la maladie de la myélopathie dégénérative peut croître et décroître. Mais, inéluctablement, elle évoluera plus ou moins vite vers une paralysie du train arrière.
Dans les stades avancés de la maladie, les membres peuvent devenir totalement paralysés (tétraparésie flasque).
Sur ce dernier point, les avis semblent diverger. Toutes les races ne connaissent pas une évolution identique de la maladie et la tétraparésie ne semble pas être un aboutissement de cette évolution dégénérative.
Des variantes de la mutation pourraient expliquer ces différentes évolutions de la maladie. Une variante de l'allèle muté a ainsi été découverte chez le Bouvier Bernois.









La qualité de vie peut être améliorée.



Il n'existe malheureusement pas de traitement laissant espérer une guérison de l'animal.
Une supplémentation quotidienne en vitamine E semble en ralentir l'évolution (Laurent Cauzinille)[4]
Un traitement qui est également conseillé par le site spécialisé en neurologie vétérinaire : Clare Rusbridge [6]
Les cellules nerveuses fragilisées par la DM sont plus sensibles aux agressions des radicaux libres.
Une constatation faite également chez l'être humain. Les médecins et les scientifiques établissent un lien évident entre une plus grande consommation d'antioxydants et une plus faible incidence de nombreuses maladies, notamment les maladies dégénératives telles que la sclérose en plaques et la maladie d'Alzheimer.

  • Info : Les radicaux libres
    Les radicaux libres sont des molécules chimiques instables produites en faible quantité par l'organisme. Ils sont principalement synthétisés dans la cellule lors de réactions avec l'oxygène. Cette instabilité chimique fait que ces substances sont très réactives et certaines des réactions avec des structures de la cellule entrainent des dégâts en leur sein. Des radicaux libres en surnombre seraient impliqués dans de nombreuses pathologies, dont les maladies neurodégénératives comme la maladie d'Alzheimer. [7]


Une bonne stratégie de lutte contre la dégénérescence des cellules nerveuses passera par la consommation de suppléments alimentaires spécifiques.
Supplémenter le régime alimentaire pour neutraliser les radicaux libres grâce aux antioxydants tels que la vitamine E, acides gras oméga-3 et 6, l'acide gamma-linoléique et L-Carnitine peut ralentir la dégradation des cellules nerveuses au cours des premiers stades de la maladie.



  • Info : La vitamine C pour dynamiser l'effet de la vitamine E
    Lorsqu'un antioxydant cède certains éléments à un radical libre, sa formule moléculaire n'est plus la même. Ainsi, une fois qu'un antioxydant a servi à neutraliser un radical libre, il ne peut plus jouer ce rôle une deuxième fois. La vitamine C a la capacité de redonner à la vitamine E ses propriétés antioxydantes. L'alimentation du chien étant pauvre ou nulle en vitamine C, une supplémentation vitamine E en association avec la vitamine C serait souhaitable.

    Nous retrouvons également ces conseils (vit E et vit C) sur le site vetmedecine [8]:
    - 400 IU of vitamin E daily (over 2 years of age, give 800 IU)
    - 250 mg vitamin C twice a day (over 2 years of age, give 500 mg)
    - Ainsi que d'autres minéraux ou vitamines : sélénium, Beta Carotene, sardine (acides gras), etc.


  • Info: Exemple de supplémentation nutritionnelle

    - Myo-Vityl (vit B1, B6, B12, E) : 2 cuill à café rase à ajouter dans le repas pendant 10j. Arrêter 5 jours, puis recommencer le cycle.
    - Juvamine vitamines A,C,E : Donner le contenu d'1 gelule par jour (apport 12mg vit E, 80mg vit C)

    Homéopathie:
    - Dilution Weleda C302 : 10 gouttes matin et soir.
    - Scorodite D6 (trituration 30G) : 1 dosette matin et soir.



Garder le chien actif pour ralentir la détérioration musculaire : la marche notamment.
L'hydrothérapie est également recommandée.








Que faire?


La DM est une maladie autosomique récessive.
Les caractéristiques d'une maladie génétique à transmission autosomique récessive sont les suivantes :
- Un individu (animal, être humain) est dit homozygote lorsqu'il présente deux allèles identiques au niveau d'un gène et hétérozygote quand les allèles sont différents.
- Une maladie est dite récessive quand le gène défectueux ne s'exprime qu'à l'état homozygote.
- Elle atteint tout individu (animal, être humain) sans distinction de sexe.
- La consanguinité augmente le risque.

Autosomique récessive, la DM n'est pas liée au sexe et les 2 allèles mutés du gène doivent être transmis pour qu'elle se déclenche un jour.
En outre, sa pénétrance est incomplète : tous les chiens homozygotes mutés ne développeront pas obligatoirement la maladie. Il est toutefois impossible, à ce jour, de déterminer parmi les chiens homozygotes mutés, lesquels développeront un jour la maladie.

La consanguinité augmente les risques :
Fait aggravant, le risque DM est 3 fois plus élevé pour un accouplement consanguin cousin x cousine (arrière-grand-père et arrière-grand-mère communs) que pour un couple non apparenté.
Si un mariage père x fille, ou mère x fils, est fait, alors le risque DM est cette fois ci 7 fois plus élevé que pour un couple non apparenté.


Convention de nommage :

Différentes méthodes de nommage des allèles du gène SOD1 existent :
- N (Normal) ou G (Good) pour l'allèle du type sauvage, non muté.
- A ou DM (Atteint ou Affected) pour l'allèle muté.

Un chien va obligatoirement correspondre à l'un des 3 profils génétiques que sont (exprimés de différentes manières selon les pays):

 Pays  Homozygotes normal  Hétérozygote pour la mutation  Homozygote muté
 France
 Normal ( +/+)
 Porteur ( +/-)
 A risque (-/-)
 Allemagne
 N/N
 N/DM
 DM/DM
 Europe Centrale et de l'Est
 G/G
 G/A
 A/A
 Hollande
 Normaal
 Drager
 Lijder
 USA & GB
 Normal (N/N)
 Carrier (A/N)
 At risk ou Affected (A/A)



En fonction des profils génétiques des reproducteurs, l'incidence DM ne sera pas la même :

Les différentes possibilités étant présentées dans le tableau ci-dessus:   Le signe + correspond à l'allèle du type sauvage, non muté.   Le signe - correspond à l'allèle muté.




Seul un chien homozygote muté ( -/- ou A/A) peut développer la maladie.
Pour certains spécialistes de la maladie, les examens cliniques semblent le prouver:

Chez les 7 races examinées jusqu'à maintenant à l'University of Missouri, aucun chien avec le résultat A/N (porteur) n'a été diagnostiqué malade de DM (août 2009).

Un animal hétérozygote pour la mutation ( -/+ ou A/N ou A/G) ne présente aucun risque d’avoir les symptômes de la maladie myélopathie dégénérative mais peut transmettre le gène à sa descendance. (Dre Dominique Paquette, DMV, Diplomate ACVIM (Neurologie) Centre vétérinaire DMV)
Les chiens homozygotes normaux (N/N) ne font pas de DM, les sujets malades sont tous de génotype DM/DM. (Laboklin, mars 2010).


Mais, une étude réalisée sur un nombre conséquent de chiens a révélé qu'1 chien montrant tous les signes de la myélopathie dégénérative était hétérozygote pour la mutation. Une idée avancée serait que des animaux hétérozygotes (porteurs) pourraient développer la MD, mais beaucoup plus tard que les homozygotes. Des données qui restent à confirmer.






Recommandations d'élevage :


Nous pouvons en conclure que tout éleveur responsable et préoccupé par l'avenir de la race qu'il élève aura à coeur d'inclure la DM dans ses choix d'élevage et qu'il prendra en compte le profil génétique des géniteurs pour le gène SOD1 avant de décider d'un accouplement. Le but à atteindre étant l'élimination de la mutation en ne faisant reproduire QUE des chiens +/+ (non porteurs de la mutation).
Tout accouplement fait avec au moins 1 des 2 chiens homozygote normal (+/+) donne la garantie d'avoir des chiots qui ne développeront jamais la maladie.

En outre, le bien-être de l'animal et le respect du futur maître doivent être préservés le plus rapidement possible.
La mutation étant maintenant identifiable par analyse ADN, tout projet de portée doit être pensé en ayant connaissance de ce profil génétique des géniteurs.
Le but étant de ne plus donner naissance à des chiots homozygotes mutés (-/-), donc porteurs de 2 copies de l'allèle muté.

Un des parents doit être homozygote normal (+/+ ou normal) pour garantir qu'aucun des chiots qui naitront ne risquera de développer un jour la maladie.
Un tel mariage ne garantira pas l'élimination de la mutation, mais il garantit la production d'animaux sains.

Conseil aux éleveurs :

Faites tester vos reproducteurs.
Faites des accouplements avec au moins 1 des parents homozygote normal (+/+)


Conseil aux particuliers :

Renseignez vous sur le profil génétique des parents pour la DM (demandez à avoir une copie du certificat de dépistage fait par le laboratoire) d'une portée avant d'aller plus avant et de vous décider sur l'achat d'un chiot.
Si 1 des 2 parents est indemne de DM, son seul certificat sera suffisant pour vous garantir une portée sans risque de DM








Le test ADN :


Différents laboratoires de biotechnologie proposent le test génétique de dépistage de la DM :

Slovgen - Genindexe - Antagene - Laboklin - Vetascien - Zoogen - OFA







CONCLUSION (à retenir):


- Un chien +/- (porteur) ou un chien -/- (à risque) peuvent reproduire, mais obligatoirement avec un chien +/+ (Normal N/N).

- Seul un chien Atteint ou à risque (-/-) pourra développer un jour la maladie.

- Un mariage dont 1 des parents est Normal (+/+) donne la garantie d'une portée sans risque de DM.










Tous droits réservés